Le Rituel en mer ,sans sépulture.

Quand un vieux bat-la -houle, avale sa chique ( ou sa gaffe),cela pose de grands problèmes à bord.Au tournant des siècles XIXéme et XXème les  navigations durent fort longtemps;un long-courrier part pour trois mois (au moins), un terre-neuvier  pour huit, un baleinier pour vingt ...Les morts n'attendent pas. Aussi  lorsqu'un décès survient, il est rapidement constaté par le capitaine qui le mentionne sur le journal de bord;un inventaire est dressé des biens du défunt, son courrier est placé sous enveloppe cachetée(il sera remis à la famille).Il est d'usage d'immerger le malheureux ,dans les  24 heures, on devine pourquoi... Au préalable, ses hardes et denrées périssables auront été vendues au pied du grand mât, au plus offrant.

Reste la cérémonie. Le corps est habillé en tenue de travail, propre, et cousu dans son hamac.Cette opération est faite avec un soin tout particulier, par le maître voilier.Le point d'arrêt final de la couture a une forte valeur symbolique. Il se fait soit à l'endroit de la bouche, qui ne parlera plus, soit au niveau du coeur qui ne battra plus.

Armand Hayet (grand érudit maritime et écrivain,capitaine au long cours (1883-1968) rapporte qu'ensuite le mousse , ému, balbutie quelque prière, tandis que le timonier fait tinter la cloche de la dunette à petits coups espacés: l'humble  glas du large.

Après quoi le corps , lesté de deux gueuses de fonte,est placé sur la planche du mort, une dernière prière est dite, se terminant par " Que votre volonté soit faite sur la terre ...et sur la mer",et mouille! C'est fini.